Il y a trois ans, le 16 octobre 2020, Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie, a été sauvagement assassiné par un terroriste islamiste parce qu’il avait enseigné la liberté d’expression dans un collège de la République..Il y a moins d'une semaine, Dominique Bernard, professeur de français dans un lycée à Arras, tombait sous les coups d'un autre fanatique islamiste en défendant ses élèves.

A travers ces meurtres c'est l'école publique et la République laïque qui est clairement visée. C'est la liberté d'apprendre, de développer un esprit critique qui est attaquée.

Au-delà du terrible drame humain, c’est sa justification qui provoque un sentiment d’horreur pour nous citoyens français et bibliothécaires attachés à la République pour ce qu’elle signifie et ce qu’elle représente : une société éclairée constituée de citoyens émancipés, disposant d’une liberté de conscience absolue, y compris sous la forme d’expressions singulières.
"Plus un peuple est éclairé, plus ses suffrages sont difficiles à surprendre [...] même sous la constitution la plus libre, un peuple ignorant est esclave." écrit Condorcet dans "Cinq Mémoires sur l'instruction publique", c’est précisément ce projet qui rend la liberté de conscience et la liberté d’expression non négociables.

Les écoles, collèges, lycées, comme les bibliothèques publiques, ont pour mission essentielle l’accompagnement de tous les citoyens dans leur quête de vérité, dans leur formation de femmes et d’hommes libres.
Pour ce faire, les bibliothèques agissent toujours dans le cadre de la neutralité, dans le respect du principe de laïcité, mais jamais dans celui de la censure. Leurs collections s’adressent à tous les citoyens, quelles que soient leurs religions, leurs opinions, leurs origines. Ces collections sont et seront toujours le reflet d’une société aux multiples facettes.

La charte des bibliothèques, adoptée en 1991 par le conseil supérieur des bibliothèques, précise ainsi leur mission :

Article 1 : Pour exercer les droits à la formation permanente, à l’information et à la culture reconnus par la Constitution, tout citoyen doit pouvoir, tout au long de sa vie, accéder librement aux livres et aux autres sources documentaires.[...]
Article 3 : La bibliothèque est un service public nécessaire à l’exercice de la démocratie. Elle doit assurer l’égalité d’accès à la lecture et aux sources documentaires, pour permettre l’indépendance intellectuelle de chaque individu, et contribuer au progrès de la société.

Aujourd’hui, ce sont tous les bibliothécaires qui sont touchés par ce drame, et ils ne peuvent que s’inquiéter de la montée des obscurantismes qui s’en prennent aux espaces de liberté que sont les établissements scolaires et forcément, tôt ou tard, aux bibliothèques.